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Élections américaines 2020 : la fuite en avant d’une démocratie

Profonde division de l’opinion publique, démocratie attaquée et espoir d’un renouveau : Trump est-il le responsable du chaos observé début 2021 aux États-Unis ? Alors que démocrates et républicains semblent irréconciliables, la vie politique semble reprendre son souffle. Enquête.

Make America great again”, martelait Donald Trump en 2016 lors de son élection. Cinq ans plus tard, le vernis qui ornait ses fantasmes présidentiels semble écaillé pour de bon. Il quitte la scène politique mondiale hué de toutes parts, léguant un chaos sans précédent. Un cirque grotesque qui aura mutilé la société américaine, la laissant plaie béante. 

Donald Trump ou l’art de diviser 

Diviser pour mieux régner. La décrépitude politique qui a frappé les États-Unis semble d’abord le ressort des clivages accentués par l’ancien président.

Ce dernier a renforcé les inégalités entre les riches et les pauvres avec la réduction des impôts pour les 1% des plus riches, ceux des entreprises de 35 à 20% et surtout, la suppression d’ObamaCare, qui permettait aux plus précaires d’accéder aux soins médicaux. “Cela témoigne d’un manque d’empathie et de compréhension, beaucoup d’Américains souffrent d’un point de vue financier” déplore Gretchen Pascalis, porte-parole des Democrats Abroad France.

Donald Trump, président des riches donc, mais aussi des personnes blanches et conservatrices.

Entre la construction du mur à la frontière du Mexique, la séparation des enfants mexicains de leurs parents sans-papiers et l’interdiction d’entrer sur le territoire des États-Unis pour les musulmans, le message semble clair.

Alors que des décrets aussi discriminants les uns que les autres fleurissaient pour preserver ladite “pureté” de l’Amérique, la colère des Afro-américains commençait à se faire entendre avec le mouvement anti-raciste Black Lives Matter, né en 2013. C’est pourtant en mai 2020, à l’apogée du clivage accru par Donald Trump, que la mobilisation a grandi et gagné tous les États suite l’assassinat de George Floyd, un Afro-américain tué par un policier à Minneapolis.

Mais c’est aussi en soutenant les suprémacistes blancs, que l’ancien président avait qualifié de “gens très bien” lors d’une manifestation particulièrement violente à Charlottesville en 2017 que ce dernier a “ouvert la porte à la haine” selon Gretchen Pascalis.

Soupçons de fraude et insurrection : une fin de mandat chaotique

Une haine qui a eu le temps de gangrenner la société américaine pendant ces quatre ans, jusqu’à exploser le 6 janvier 2021.

Washington, ébranlée par des partisans de Trump bien déterminés à saccager ce qu’il restait de dignité à la démocratie américaine, se souviendra de ces sombres heures au goût amer d’insurrection.

Cette manifestation, “en marge” et “indépendante des commandements” de l’ancien président selon Nicolas Conquer, membre des Republicans Overseas, semble pourtant le fruit du continuum de mensonges proférés par Donald Trump tout au long de son mandat.

Dès le 3 novembre, des rumeurs de fraude pululaient sur les réseaux sociaux, d’abord par l’un de ses fils puis par lui-même, évoquant une “fraude massive”. Nicolas Conquer en est sûr, “il y a eu des problèmes par rapport à l’élection”.

En à peine trois jours, le camp Trump dépose quatre recours, exigeant tantôt le recomptage des bulletins, tantôt l’arrêt des dépouillements pour ne pas comptabiliser les “votes illégaux”, sans jamais les définir.

Pourtant, le média Politifact, spécialiste de la vérification des informations politiques l’affirme : aucune fraude n’a été observée.

Plus encore que les sondeurs, c’est la démocratie américaine qui a perdu, c’est extrêmement grave” déplore Pascal Boniface, géopolitologue. Ces mensonges additionnés à l’invasion du Capitole ont coûté à l’ancien président sa liberté d’expression en ligne : Twitter a suspendu le compte de l’ancien président dès le lendemain des événements.

Le chaos risque de s’aggraver” alarmait Mr Boniface en novembre 2020… Il avait vu juste.

Gouvernement Biden : vers une nouvelle ère ? 

Malgré l’absence de Donald Trump à la cérémonie d’investiture du nouveau président le 20 janvier 2021 et son refus de participer à la transition entre les deux administrations, la vie politique semble retrouver de sa vigueur à Washington.

Ce souffle nouveau semble l’apanage d’un nouveau gouvernement, à l’image de la société américaine : paritaire, diverse, plurielle.

Kamala Harris devient dès lors la première femme noire à accéder à la vice-présidence, faisant de cette élection un événement historique. Pete Buttigieg est le premier homme politique LGBT à accéder au poste de ministre des transports, de même pour Deb Haaland, première femme amérindienne et membre de la tribu Laguna Pueblo à investir le ministère de l’Intérieur.

Biden a rassemblé un groupe solide autour de lui, il a une vraie plateforme politique contrairement à Trump qui souvent parlait, mais ne faisait rien de concret”, déclare Gretchen Pascalis.

Joe Biden, président de tous les Américains ? Son gouvernement tend à le confirmer, en plus des mesures déjà adoptées depuis janvier 2021, comme le retour des États-Unis dans les accords de Paris ou encore la suppression du décret interdisant aux ressortissants étrangers d’accéder au territoire nord-américain.

De plus, après quatre ans de tumulte, la transparence semble de mise : le démocrate enchaîne les réunions de presse.

Il sait “rassurer et rassembler par son ton fédérateur” selon Mme Pascalis et “montre qu’il souhaite être le président de tous les Américains”.

De quoi, peut-être, panser les maux d’une société morcelée.

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Féminisme Monde

Iran : quand la santé des femmes se marchande

Depuis l’automne 2020, la République islamique d’Iran a interdit la distribution gratuite de contraceptifs, mettant à l’arrêt le Planning Familial. Tandis que les femmes des régions rurales et pauvres sont les premières à en pâtir, des médecins généralistes tirent la sonnette d’alarme.

Deux enfants suffisent”, martelaient les autorités iraniennes dans les années 80. Désormais, et cela depuis dix ans, le Guide suprême Ali Khamenei mène une politique nataliste ayant comme objectif de “doubler la po­pulation” d’Iran et contrer le vieillissement de cette dernière.

Durant l’été 2020, le Parlement s’est empressé d’adopter un texte rendant interdite la distribution gratuite de contraceptifs. Le coup de grâce du gouvernement, qui avait déjà interdit la vasectomie et la ligature des trompes en 2014. 

Un accès inégalitaire aux contraceptifs

Peu importent les moyens de contraception, ce sont dorénavant les patients qui doivent se les procurer au secteur privé et “les payer aux prix dits libres, c’est-à-dire non couverts par la sécurité sociale” explique Hamid, un médecin généraliste en milieu rural.

L’arrêt des activités du Planning familial depuis l’automne 2020 plonge certaines Iraniennes dans une incertitude abyssale.

C’est notamment le cas dans les régions les plus reculées du pays où l’accès à la contraception était déjà très limité, en plus du manque d’infrastructures et d’opportunités d’éducation et de travail. Explosion des inégalités sociales garantie.

La santé des femmes en jeu 

Les conséquences sont dramatiques quant à la santé, aussi bien physique que psychique des Iraniennes. Ces interdictionsont déjà causé des problèmes psychologiques” chez certaines femmes nomades, alarme un médecin généraliste dans le mensuel Andisheh Pouya.

Cela aggrave leur condition, déjà laborieuse : elles se marient très jeunes, ont beaucoup d’enfants et assurent toutes les tâches domestiques en plus de l’élevage des animaux.

La fin de la contraception gratuite va entraîner des grossesses toujours plus nombreuses et dangereuses, en dépit de leur santé et de leur bien-être. D’autres femmes étaient déjà en proie depuis des années à de “nombreuses infections et maladies” en raison du manque de serviettes hygiéniques dans certaines régions.

À cela s’ajoutera une mortalité féminine sans précédent.

Louise Lucas.

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Féminisme Monde

Investiture de Joe Biden : des femmes engagées marquent le début d’une nouvelle ère

Mercredi 20 janvier a eu lieu la cérémonie d’investiture de Joe Biden, le 46ème président des États-Unis. Des femmes d’exception sont venues exposer leurs talents, symbolisant l’Amérique inclusive et diverse que défend le démocrate.

Un souffle nouveau effleure Washington. Mardi 20 janvier, Joe Biden est devenu officiellement le 46ème président des États-Unis, grâce à une cérémonie aussi singulière que symbolique, mettant à l’honneur des femmes d’exception. 

Parmi elles, Amanda Gorman, jeune poétesse afro-américaine de 22 ans. Elle a lu l’un de ses poèmes, The Hill we Climb, à travers lequel elle a appelé à l’unité. Ambitieuse, la jeune femme qui a été invitée sous les conseils de Jill Biden, aspire à devenir présidente à l’avenir. De quoi rappeler une certaine Kamala Harris… Le gouverneur démocrate de Californie Gavin Newson voit d’ailleurs en elle “le futur de l’Amérique”. 

Autre femme à l’honnheur, Lady Gaga. Elle a entonné l’hymne américain avec puissance et flamboyance, délivrant un message de paix

La chanteuse a été précédée par Jennifer Lopez, venue interpréter la célèbre chanson de Woody Guthrie This land is your land. Très engagée pour la communauté latino-américaine, dont elle fait partie, elle s’est ecriée “Justicia para todos !”, (“Justice pour tous”). 

Un trio de femmes engagées et brillantes ont donc incarné l’inclusivité et la diversité, valeurs chères à Biden qui les a déjà appliquées dans son gouvernement. Reste à voir si la politique qu’il mènera sera à l’image de cette cérémonie.

Louise Lucas.

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Kamala Harris vice-présidente : quel futur pour les Américaines ?

Samedi 7 novembre 2020, le verdict est enfin tombé : Joe Biden deviendra le 46ème président des États-Unis le 20 janvier 2021, avec sa vice-présidente Kamala Harris. Cette dernière incarne un nouveau souffle pour une partie de la société américaine, sous tension depuis de longs mois.

Kamala Harris, une femme de tête 

Une femme à la vice-présidence, c’est une première aux États-Unis. D’abord procureure de San Francisco puis procureure générale de Californie, Kamala Harris a rejoint le monde de la politique il y a 5 ans en tant que sénatrice. Elle s’y est distinguée par sa pugnacité et son ambition, qui la mènent aujourd’hui à ce statut de pionnière.

« Je suis peut-être la première femme à accéder à ce poste, mais je ne serai pas la dernière« , a-t-elle affirmé le soir de la victoire de Biden, à Wilmington.

Kamala, c’est l’avenir

Née de parents immigrés, d’un père jamaïcain et d’une mère indienne, Kamala Harris a suivi leurs pas : elle s’est toujours engagée pour les droits civiques des Américains racisés. Elle n’avait d’ailleurs pas hésité à attaquer à de multiples reprises les positions passées de Joe Biden sur les politiques de déségration raciale dans les années 70. 

Aujourd’hui, c’est l’apothéose d’un combat : elle est la première femme noire à accéder à un tel poste, d’autant plus symbolique au lendemain des manifestations Black Lives Matter. 

Kamala, c’est l’avenir”, selon Theodora Egbuchulam, avocate afro-américaine. L’élection de la sénatrice est lourde de sens et montre un visage plus représentatif de l’Amérique. Un autre visage que celui d’un “homme blanc typique” d’après ses termes.

Vers une Amérique plus progressiste 

Joe Biden laisse présager une politique plus favorable aux droits des femmes et aux minorités, notamment sur les questions d’égalité au travail et de droits reproductifs”, explique Hélène Quanquin, spécialiste des mouvements féministes aux États-Unis. 

De plus, selon elle, l’élection du duo démocrate donne l’espoir d’une évolution vers une parité au sein du gouvernement, où les femmes demeurent minoritaires. 

Ainsi, grâce à Kamala Harris, le féminisme intersectionnel aura une chance de s’inviter dans le cercle de pouvoir américain, qui pourra prendre en compte les oppressions que subissent les femmes racisées, une bonne fois pour toutes.

Si un mandat de Biden et Harris ne suffira sûrement pas à apaiser une société américaine plus divisée que jamais, les États-Unis semblent enfin retrouver le droit chemin.

Louise Lucas.